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L’histoire d’Angel commence par un flacon d’un bleu astral : une étoile à cinq branches, réplique d’une bague que Thierry Mugler portait au doigt comme un talisman. Clarins – avec qui le couturier s’est associé – n’avait aucune expérience dans le monde du parfum. Il fallait frapper fort et se distinguer immédiatement. Le flacon, dessiné par le styliste lui-même et mis en forme par le sculpteur Jean-Jacques Urcun, n’a pas encore de nom. L’idée de le baptiser du patronyme du créateur est immédiatement écartée : Thierry Mugler est inconnu du grand public et cette fragrance ambitionne de parler au plus grand nombre.
« Le parfum ne se résume pas au nom d’un créateur, il est d’ailleurs censé lui survivre longtemps. Il faut donc raconter une histoire, créer une tension, un suspense », ajoute Vera Strubi. En quête d’une idée forte, la présidente de la branche parfums se souvient du défilé-spectacle de Thierry Mugler, L’Hiver des anges, organisé au Zénith de Paris en mars 1984 avec quelques créatures célestes et ces femmes parées d’une auréole et d’ailes dorées qui descendaient du ciel. Un événement qui a laissé la planète mode sans voix. Vera Strubi commence alors à lister tous les mots ayant rapport avec le firmament : ciel, azur, astral, céleste… « J’avais en tête le morceau d’Elvis Presley (You’re the) Devil in Disguise. Ça faisait quelque chose comme : You look like an angel, walk like an angel… »
Parmi tous les mots qu’on lui soumet, le couturier de la démesure penche pour star, l’étoile et la vedette hollywoodienne de l’âge d’or. Mais Vera Strubi n’en démord pas : ce sera Angel, nom sexy et provocant. Angel et pas Ange. Dans Angel, on peut entendre un prénom, celui d’une femme. On peut même y voir une connotation érotique. « On s’imagine parfaitement avoir un rendez-vous avec Angel et faire des folies avec son corps », s’amuse Vera Strubi. Après tout, le parfum signé Olivier Cresp est d’une sensualité folle avec cet accord patchouli-praline surdosé. Il y a juste un petit problème : le groupe Unilever a déposé « angel skin » et « angel dust ».
Après quelques discussions, la multinationale anglo-néerlandaise cède sans difficulté les droits. Les dirigeants de l’époque ont dû s’en mordre les doigts quand on sait que le parfum est toujours dans le top 10 des ventes en Europe, depuis son lancement, en 1992. Chez Clarins, on est persuadé d’avoir trouvé la martingale avec ce mot magique. « A l’époque, je m’étais mis en tête de ne recourir qu’à des noms de parfum très courts commençant tous par la lettre A », se souvient Vera Strubi. Après Angel, il y aura successivement A*Men (1996), Alien (2005) et puis Aura (2017).
Retrouvez ici tous les épisodes de la série « Nom d’un parfum ! ».
Lionel Paillès
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